Restauration du bureau de Louis XV

La restauration des boiseries du cabinet d'angle du roi, réalisée en 2019 grâce au mécénat de Rolex France, a été l'occasion de rendre son éclat d'origine à un meuble emblématique du Château : le bureau du roi Louis XV.

Le bureau de Louis XV, chef d'oeuvre de l'ébénisterie du XVIIIe siècle, a passé près de 9 ans entre les mains des maîtres Oeben et Riesener avant d'être finalement achevé en 1769. Miraculeusement préservé des ventes révolutionnaires, le secrétaire revint à Versailles en 1957. 

 

Le bureau à la loupe

La restauration du bureau de Louis XV avait été envisagée depuis plusieurs années et, en prévision, de nombreuses analyses avaient été menées par le Centre de Recherche et de Restauration des Musées de France (C2RMF) afin de mieux connaître le meuble : radiographies, photographies en infrarouge et en ultraviolet, identification scientifique des essences utilisées pour composer les marqueteries, analyse des composants chimiques ou naturels employés pour colorer ces mêmes bois, micro prélèvement, etc.  Arrivé dans les locaux du C2RMF, le bureau a été entièrement photographié puis démonté. Les bronzes, la pendule et les plaques de porcelaine de Sèvres furent retirés pour être traités indépendamment par des restaurateurs spécialisés.

    Un premier examen prouvait que le meuble ne présentait pas de désordres majeurs, tout au plus remarquait-on des fentes sur ses deux côtés, quelques zones de décollement dans le placage, et plusieurs lacunes au niveau de la balustrade ceinturant le plateau du meuble. Il paraissait néanmoins très terne et les bronzes étaient extrêmement encrassés, offrant des parties noires que l'on pouvait assimiler à des pertes de dorure. L'enlèvement des bronzes a confirmé ce que l'on pouvait supposer, à savoir que la lumière avait fait son œuvre. Le meuble avait considérablement pâli au cours du temps, la plupart des couleurs des bois de placages avaient disparu pour donner ce camaïeu de bruns que présentent aujourd'hui quasiment tous les meubles du XVIIIe siècle.

     

    La restauration

    Le travail des restaurateurs en charge du bâti et de la marqueterie consista à tenter de réduire et à stabiliser les fentes des deux côtés du meuble. Celles dont les lèvres ne purent être rapprochées de manière totalement jointive et offrant un "jour" de quelques millimètres furent comblées par une matière synthétique réversible. De tonalité blanche, cette dernière fut maquillée par une restauratrice spécialisée en peinture qui recomposa de manière illusionniste les motifs marquetés.

    © EPV / Thomas Garnier

    Les analyses avaient démontré la présence de chrome sur toute la surface du meuble. Elle était la conséquence d'un vernis posé lors de la dernière restauration du meuble il y a environ une soixantaine d'années. Il fut décidé de retirer ce vernis qui s'est opacifié avec le temps (il a été conservé à l'intérieur du meuble comme témoignage de son histoire) et de poser à sa place un vernis reprenant une recette du XVIIIe siècle. Cette opération a redonné une plus grande lisibilité à la marqueterie et a permis de redécouvrir l'extraordinaire qualité du travail des marqueteurs, de remettre en valeur la précision chirurgicale de la découpe des bois de placage et le choix parfait des feuilles pour profiter des veines des essences et composer les motifs.

    Enfin, les lacunes de placage au niveau de la balustrade ont été comblées par un produit de synthèse maquillé pour les petites surfaces, et avec une essence de bois identique pour les plus grandes.

    De leurs côtés, les bronzes firent l'objet d'un simple nettoyage à la vapeur et gommage excluant tout produit chimique. Le résultat fut spectaculaire, l'enlèvement des couches de saletés permettant de redécouvrir une extraordinaire dorure en nettement meilleur état que supposé après un simple examen visuel, mais aussi de remettre en valeur le jeu de mats et de brillants devenus inexistant, et de retrouver toutes les subtilités de la ciselure du métal. Il en fut de même pour les deux plaques de porcelaine de Sèvres dont le simple nettoyage permit de retrouver toute la nervosité des reliefs et la blancheur de la matière.

    Détail du bureau du roi

    Détail du bureau du roi

    © EPV / Thomas Garnier

    Détail du bureau du roi

    Détail du bureau du roi

    © EPV / Thomas Garnier

    Détail du bureau du roi

    Détail du bureau du roi

    © EPV / Thomas Garnier

    Détail du bureau du roi

    Détail du bureau du roi

    © EPV / Thomas Garnier

    Détail du bureau du roi

    Détail du bureau du roi

    © EPV / Thomas Garnier

    D'autres opérations de restauration ponctuelles eurent également lieu : révision de la pendule pour qu'elle puisse à nouveau fonctionner et dépoussiérage par aspiration du velours de soie couvrant la tablette du meuble ou de la soie tapissant l'intérieur des tiroirs.

     

    La modélisation

    La restauration du bureau a permis de le décomposer en 25 sous-ensembles, eux-mêmes constitués de près de 2 800 pièces en tout. Ces nombreux éléments ont été numérisés, un à un, pour aboutir à des modélisations détaillées du meuble en trois dimensions.

    Ouverture du bureau et de ses tiroirs

     

     

     

    Vue éclatée des 2 800 pièces du bureau

    25 sous-ensembles :

    • 1 piètement avec 4 tiroirs et 3 tiroirs secrets,
    • 1 corps haut avec 2 tiroirs secrets,
    • 1 gradin avec 6 tiroirs et 3 serre-papiers,
    • 1 rideau,
    • 1 galerie,
    • 1 plateau et 1 lutrin.

    2 800 pièces :

    • 509 pièces de bois massif (de plus de 5mm d'épaisseur) en chêne, tilleul, amarante, bois de rose...
    • 1 550 pièces de placage en amarante, bois de rose, buis, poirier noirci, érable...
    • 645 pièces de quincaillerie en laiton, fer, garnitures de bronze
    • 96 pièces de tissu en velours à vignette dorée et soie moirée
    • 2 plaques de porcelaine de Sèvres

     

    Mécanismes cachés

    Le démontage du meuble nécessaire à sa restauration donna la possibilité de mieux accéder au mécanisme du bureau qui ne s'ouvre plus tel que Riesener le décrivit dans son mémoire. Initialement, d'un simple tour de clef, le roi pouvait relever et rabaisser le cylindre mû par un système de ressorts. Aujourd'hui, il faut tourner la clef qui fait office de manivelle pour que le cylindre bouge. Les différentes traces de fixation visibles au revers du bâti du corps du cylindre témoignent de changements opérés après la livraison du meuble, sans pour autant apporter toutes les explications souhaitées. Il reste tout de même plus d'éléments anciens que supposés, mais la disparition des ressorts est maintenant irréversible.

    Découvrez les étonnants mécanismes du bureau dans cette modélisation 3D :

     

    Mécénat

    Animée de cette volonté de contribuer à la préservation et à la transmission d’un patrimoine culturel unique inscrit dans l’histoire, Rolex France est particulièrement heureuse d’avoir engagé cette action de mécénat pour la restauration du cabinet d'angle de l'appartement intérieur du Roi, pièce majeure, à la fois par son décor, son secrétaire à cylindre et sa symbolique. Rolex France est fière également d’avoir accompagné le domaine de Versailles dans sa politique de mise en valeur de son patrimoine en permettant un nouveau rayonnement de ce lieu d’exception.

     

    Peintures de bois

    Un article des conservateurs de la C2RMF