Un chef-d’œuvre de style et de réalisation
Cette pièce en porcelaine tendre fait partie des quatre « grands plats ovales » du service livré à Louis XV, le 31 décembre 1755, pour le prix très important de 840 livres. Le plat est d’une dimension hors norme (60,5 cm de longueur contre 44,5 cm de largeur) et comprend en son centre un élégant bouquet de fleurs polychromes sur fond blanc. L’aile – c’est-à-dire les bords du plat – est ornée de crosses et de palmettes en relief ainsi que de quatre espaces peints de fleurs. Chacune de ces réserves est bordée d’une frise peinte à l’or et ciselée d’épines de rose, de piastres ou de sequins et de branches de fleurs. Ce motif de dorure caractérise les pièces du service bleu céleste de Louis XV.
Le prix particulièrement important de ce seul plat s’explique par le travail complexe de mise en œuvre et de décoration qu’il a nécessité. Les ouvriers de la manufacture de Vincennes durent affronter de multiples difficultés techniques dans le façonnage, la cuisson, la pose des couleurs et la manipulation d’une pièce aussi lourde.
Le premier des grands services mythiques de la manufacture de Vincennes-Sèvres
La commande du service de Louis XV, le premier grand service de table réalisé par la manufacture de Vincennes, date, semble-t-il, de 1751. À cette date, toutes les circonstances et les compétences étaient réunies pour que la Manufacture se lance dans la production d’un tel ensemble. Les difficultés techniques ayant été vaincues, l’établissement pouvait, avec le soutien appuyé du Roi, entreprendre cet ambitieux projet. La fabrication ne put commencer qu’en 1753, lorque la mise au point du fond bleu céleste, appelé aussi bleu ancien, fut enfin maîtrisée. Le nom de ce fond était un hommage implicite à la Chine, surnommée l’Empire céleste, et dont les porcelaines à fond bleu turquoise étaient très prisées des amateurs de porcelaine du XVIIIe siècle.
Au total, 1749 pièces furent produites, dont 1266 pièces en biscuit pour le décor de table, et livrées entre décembre 1753 et décembre 1755. Il fut décidé que toutes les pièces porteraient un décor de fleurs et de fruits, inscrits dans des cartouches soulignés de frises de sequins ou d’épines de rose, peints à l’or. Le nombre important de pièces était justifié autant par les exigences du service « à la française » que par la volonté de surpasser la manufacture de Meissen en Saxe qui dominait à ce moment la production de porcelaine en Europe.
Le service bleu céleste fut en partie revendu par Louis XV. Les pièces restées à Versailles furent utilisées par la famille royale jusqu’à la fin de l’Ancien Régime. Il fut notamment transféré au Petit Trianon, sans doute en 1778, et employé par la reine Marie-Antoinette. Ce service fut célèbre dès sa création : avant même la livraison à Versailles de sa première partie, les pièces réalisées furent exposées chez le célèbre marchand mercier parisien Lazare Duvaux.
Parmi les personnes qui ont participé à la fabrication de ce premier chef-d’œuvre de la manufacture de Vincennes se trouve l’orfèvre et bronzier Jean-Claude Duplessis, l’un des meilleurs ornemanistes de son temps, qui dessina les pièces du service. L’on peut également citer le chimiste Hellot, membre de l’académie des Sciences et engagé à la Manufacture en 1751, qui réussit le tour de force de la mise au point du fameux bleu céleste qui caractérise le service.
Le service comprenait originellement quatre plats de ce format hors norme. Trois d’entre eux ont pu être recensés au Petit Trianon à l’époque de Marie-Antoinette sous la dénomination « 3 grands plats ovales ». Tout comme le reste du service encore présent à Versailles, ils furent dispersés à la Révolution.
Aujourd’hui, trois de ces plats sont connus. Deux sont à Boughton House en Angleterre, et le troisième est celui que le château de Versailles vient de préempter.
L’acquisition de ce grand plat ovale est d’un intérêt majeur pour les collections nationales et pour le château de Versailles, qui ne possèdent pas encore de pièces de ce format.
à propos de la Société des Amis de Versailles
Fondée en 1907 pour remédier à l’état de délabrement des châteaux de Versailles et de Trianon, la Société des Amis de Versailles est reconnue d’utilité publique depuis 1913. Forte de plus de 5000 membres et du soutien de nombreux mécènes, elle œuvre depuis plus de cent ans avec passion et enthousiasme à des projets de restauration, à des acquisitions et au rayonnement du château et du domaine de Versailles
Actuellement, la Société des Amis de Versailles a engagé une collecte de fonds en faveur de la restauration des sacristies et de la mise en valeur du trésor de la Chapelle royale.





