Le Versailles de
Alexandre Dupilet

Agrégé et docteur en histoire il est spécialiste de la régence de Philippe d’Orléans. Auteur de nombreux ouvrages sur le sujet, il est intervenu à plusieurs reprises pour la programmation culturelle « 1 an à Versailles ». Découvrez « Le  Versailles de » Alexandre Dupilet.

Sa biographie 

Diplômé de l'IEP Paris, agrégé et docteur en histoire de l'Université Paris-VIII Vincennes-Saint Denis, Alexandre Dupilet est spécialiste de la régence de Philippe d’Orléans. Il est notamment l’auteur des ouvrages La Régence absolue - Philippe d'Orléans et la polysynodie (1715-1718) (Editions Champ Vallon, 2013),  Le cardinal Dubois. Le génie politique de la Régence (Tallandier, 2015) et Le Régent. Philippe d’Orléans, l’héritier du Roi-Soleil (Tallandier, 2020). Depuis 2015, il est intervenu à plusieurs reprises pour la programmation culturelle « 1 an à Versailles ».

Ses coups de cœur

  • Versailles émerveille le visiteur, mais bien souvent chacun s’attache à un lieu plus qu’à un autre ; lequel est-ce pour vous ? Pourquoi ?

Sans aucune hésitation, le bosquet de l’Encelade. Cette affection toute particulière est liée à ma première visite du Château, à l’occasion d’un voyage de fin d’année à l’école primaire. Mon instituteur l’avait préparé très sérieusement et nous avait projeté quelques diapositives. Nous venions du Pas-de-Calais et on ne se rendait pas à Versailles tous les week-ends ! Lors de cette « séance-diapo », l’Encelade et les explications sur l’allégorie de la Fronde, que mon maître n’avait pas manquée d’évoquer, avaient suscité ma curiosité. J’avais hâte de le découvrir et je n’ai pas été déçu. L’endroit est vraiment magique, notamment car la sculpture de Marsy, en ne laissant voir qu’une infime partie du géant laisse une grande place à l’imaginaire. Il n’est pas difficile pour un enfant de se représenter la taille du géant et de faire vivre la scène.

  • Au détour d’une salle ou d’une allée, une peinture, une sculpture ou un objet a retenu votre attention ; quel est-il ? Que représente-t-il pour vous ?

J’ai eu le privilège de faire quelques visites privées du Château et d’accéder à des salles qui ne sont qu’occasionnellement ouvertes au public. C’est au cours de l’une d’entre elles que j’ai pu admirer le portrait de cire de Louis XIV d’Antoine Benoist, avant qu’il ne soit restauré. Ce masque est saisissant et fascinant. Il échappe aux canons esthétiques de la propagande royale, il est sans concession avec le souverain et ne cherche à cacher aucun de ses défauts physiques. On se demande comment le Roi-Soleil, si soucieux de son image, a pu accepter ce « portrait ». Il est le « miroir inversé » du fameux tableau de Rigaud, tout en étant son complément idéal. Ces deux portraits constituent la parfaite illustration de la théorie des deux corps du roi de Kantorowicz : d’un côté, le corps politique sur lequel le temps n’a pas de prise, de l’autre, l’enveloppe charnelle d’un souverain usé par le gouvernement du royaume.

Portrait de cire de Louis XIV

© Château de Versailles, Dist. RMN / © Christophe Fouin

Le lien vers le site collection

 

  • Nos premiers pas dans la galerie des Glaces, l’eau jaillissant des Grandes Eaux… Chacun d’entre nous possède un souvenir de Versailles plus fort que les autres. Lequel est-ce pour vous ?

Je suis également professeur dans le secondaire et à ce titre j’ai organisé de nombreuses sorties à Versailles. Lorsqu’on enseigne dans la région parisienne, c’est très simple et je me rends au Château avec mes élèves presque chaque année. J’ai un souvenir particulièrement vif de ma première visite en tant que professeur. Nous avions pris le RER, emprunté l’avenue de l’Europe puis l’avenue de Paris. Lorsqu’on chemine dans les allées, le Château est caché par les arbres. Nous débouchons donc sur la place d’Armes et là je vois de nombreux élèves, les yeux écarquillés, manifester bruyamment à leur manière leur éblouissement devant l’enfilade des cours et la masse imposante du Château. À ma grande surprise, la plupart d’entre eux n’étaient jamais venus à Versailles ! Et ce souvenir est toujours renouvelé puisque lors de chaque visite, je peux assister à ce type de réactions réjouissantes.

Ses conseils lecture

  • Versailles se raconte à travers des milliers de pages, des mémoires les plus anciens aux livres d’art les plus récents. Quel est pour vous le livre incontournable sur Versailles ?

Quelle question difficile ! Il en existe tant. Et le plus impressionnant est que les livres qui sont publiés aujourd’hui réussissent encore à apporter de l’inédit à un sujet qu’on pourrait croire rebattu. Je pense notamment aux magnifiques catalogues édités à l’occasion des expositions organisées au Château. Celui sur les fêtes ou encore celui sur la mort du roi pour ne citer qu’eux sont splendides et sont le reflet parfait d’expositions passionnantes. Mais puisqu’il ne faut en choisir qu’un, je dirais Versailles ou la figure du roi de Gérard Sabatier. Il est certain que cela ne se lit pas comme un roman. Mais c’est un livre majeur, un véritable monument à l’image de son sujet dans lequel l’érudition impressionnante, la variété des sources et la rigueur de l’analyse débouchent sur une thèse décapante à savoir, pour la résumer grossièrement, que la symbolique versaillaise fut incomprise du vivant même de Louis XIV.

  • Classique, récit d'aventures, beau-livre… Incontournable de votre bibliothèque ou récente découverte, auriez-vous un conseil de lecture à nous donner ?

Je lis beaucoup de romans, beaucoup plus que des livres d’histoire. Cela ne m’a pas empêché de passer complètement à côté d’une auteure majeure que j’ai donc découverte récemment. Il s’agit de Joyce Caroll Oates. C’est simple : il suffit de lire une dizaine de pages de n’importe lequel de ses romans pour comprendre que vous avez affaire à une romancière exceptionnelle. Seuls les grands classiques, ou pour évoquer des auteurs plus récents, des écrivains comme Philip Roth, m’ont fait cet effet. Son œuvre est aussi impressionnante par son ampleur et cela donne de belles perspectives de lecture. S’il faut conseiller un livre, mais je suis très loin d’avoir tout lu, je dirais Les chutes, roman touffu qui permet de se faire une bonne idée de l’écrivaine. Sinon, le récent Un livre de martyrs américains, déstabilisant, inconfortable mais très impressionnant.

Retrouvez en écoute la conférence d'Alexandre Dupilet : "Philippe d'Orléans, l'héritier du Roi-Soleil".

Alexandre Dupilet est le lauréat 2021 du Prix château de Versailles du livre d’Histoire pour son ouvrage Le Régent. Philippe d’Orléans, l’héritier du Roi-Soleil édité aux éditions Tallandier.

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